Chute d’un patient dans l’escalator de l’hôpital : carence dans la surveillance du patient

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Chute d’un patient dans l’escalator de l’hôpital : carence dans la surveillance du patient

Appréciation par le juge des critères permettant d'estimer s'il y a ou non manquement de l’hôpital à son obligation de surveillance après la chute d’un patient dans un escalator. M. A., âgé de soixante-douze ans, a été hospitalisé dans un établissement hospitalier en raison d'un problème cardiaque. Lors d'une promenade, il a été victime d'une chute dans l'escalier mécanique du hall de l'établissement, entraînant un traumatisme crânien. Le lendemain, il a été découvert inconscient au pied de son lit. Un scanner cérébral a révélé un hématome sous-dural et, malgré une intervention chirurgicale, il est décédé. La veuve et les enfants de M. A. reprochent à l'établissement hospitalier d'avoir manqué à une obligation de sécurité de résultat dans l'exécution du contrat d'hôtellerie, soutenant qu'il aurait été nécessaire d'interdire aux patients, affaiblis et se déplaçant avec une canne, d'accéder à l'escalier mécanique en leur demandant de prendre l'ascenseur. Ils lui reprochent également d'avoir commis une faute dans l'exécution du contrat de soins, faute d'examen minutieux après la chute dans l'escalier mécanique et faute d'une surveillanceadaptée au cours de la nuit ayant suivi cette chute. Ces fautes seraient la cause directe du décès, ou, à tout le moins, à l'origine d'une perte de chance de ne pas décéder. Dans un arrêt du 3 mai 2019, la cour d’appel de Colmar rappelle que l'action en réparation du préjudice par ricochet subi par des membres de la famille du patient du fait des dommages survenus à ce dernier au cours de l'hospitalisation a un caractère délictuel. Ils doivent dès lors rapporter la preuve d'une exécution défectueuse du contrat, constitutive d'une faute. Elle rappelle, en outre, que, sauf pour ce qui concerne l'hygiène et la fourniture de matériel et de médicaments, l'établissement de soins n'est pas tenu d'une obligation de sécurité de résultat à l'égard de son patient, mais seulement d'une obligation de prudence et de diligence.La cour d'appel en conclut que les intimés sont dès lors mal fondés à demander réparation du préjudice subi du fait du décès de M. A. en soutenant que l'établissement hospitalier a manqué à une obligation de sécurité de résultat dans l'exécution du contrat d'hôtellerie conclu avec le patient. En l'espèce, la cause de la chute de M. A. dans l'escalier mécanique n'est pas établie.Aucun élément concernant l'état de santé de celui-ci à la date de cette chute ne permet d'affirmer qu'il convenait de lui interdire l'accès aux escaliers mécaniques de l'établissement ou d'assurer une présence constante auprès de lui lors de ses déplacements.Aucune faute de l'établissement à l'origine de la chute initiale de M. A. n'est donc démontrée. Si, selon l'appréciation a posteriori de l'expert judiciaire, la réalisation d'un scanner cérébral après la chute aurait sans doute été souhaitable, aucun élément ne permet d'affirmer que cet examen était nécessaire au vu de l'état du patient. L'absence d'un tel examen ne permet donc pas de caractériser un défaut de diligence de la part de l'établissement hospitalier.En outre, selon l'expert judiciaire, rien ne permet d'affirmer que la réalisation d'un scanner cérébral immédiatement après la chute aurait permis de dépister un saignement débutant. Il n'existe donc pas de lien de causalité direct et certain entre l'absence d'un tel examen et la réalisation du préjudice. En revanche, la chute de M. A. et les lésions constatées, révélatrices d'un traumatismecrânien, rendaient nécessaires la prescription d'une surveillance rapprochée durant vingt-quatre heures, avec un contrôle strict de la conscience toutes les deux heures au moins.La surveillance clinique n'a pas été optimale au cours de la nuit ayant suivi la chute et n'a pas permis de repérer les premiers signes d'aggravation neurologique. La cour d'appel juge que, du fait de la carence de l'établissement hospitalier dans la surveillance de son patient après la chute, M. A. n'a pas pu être transféré dans un service de neurochirurgie dès l'apparition des premiers symptômes et avant l'aggravation des lésions et qu'il a ainsi perdu une chance de voir se réaliser une évolution favorable. - Cour d’appel de Colmar, 2ème chambre civile, section A, 3 mai 2019 (n° 13/05658), Groupe hospitalier Saint-Vincent - clinique Sainte-Anne c/ consorts A. - http://web.lexisnexis.fr/LexisActu/CAColmar_3mai2019_1305658.pdf