Article publié dans 7Officiel – Mardi 3 décembre 2014 – N°1721

DROIT EUROPÉEN : l’exigence d’une information claire et compréhensible sur les produits d’investissement

Le Conseil a adopté le 10 novembre 2014, un règlement visant à améliorer la transparence des produits d’investissement packagés fondés sur l’assurance.

Les personnes qui souhaitent réaliser un investissement se voient proposer un large éventail de produits d’investissement packagés, souvent combinés à une couverture d’assurance, qui s’avèrent difficilement compréhensibles.

Les informations fournies aux investisseurs sur ces produits d’investissement ne permettent ni la comparaison des différents produits, ni de comprendre leurs caractéristiques.

Les personnes investissent sans comprendre les risques et les coûts associés, et subissent parfois des pertes imprévues, dont les conséquences peuvent s’avérer catastrophiques pour les petits épargnants.

Le règlement s’applique à tous les produits dont le montant remboursable à l’investisseur est soumis à des fluctuations parce qu’il dépend de valeurs de référence, ou à des performances d’un ou plusieurs actifs que l’investisseur de détail n’achète pas directement.

Ils agissent comme une interface entre l’investisseur de détail et les marchés, grâce à un processus de packaging ou de regroupement des actifs de façon à obtenir des expositions, des caractéristiques de produits ou des structures de coûts différentes de ce que permettrait la détention directe. Ce packaging permet aux investisseurs de détail de se lancer dans des stratégies d’investissement qui, autrement, seraient inaccessibles ou difficiles à mettre en œuvre, mais il peut aussi rendre nécessaire la mise à disposition d’informations supplémentaires aux investisseurs, notamment pour permettre des comparaisons entre différents types de packaging.

Il s’agit par exemple des fonds d’investissement, des polices d’assurance-vie, et des produits et dépôts structurés.

Le règlement ne s’applique en revanche pas aux investissements directs comme l’achat ou la détention d’actifs, tels que les actions de sociétés ou les obligations.

Le règlement exclut également de son champ d’application :

  • Les produits d’assurance qui n’offrent pas de possibilité d’investissement et les dépôts exposés uniquement à des taux d’intérêt.
  • Les fonds d’investissement qui visent spécialement les investisseurs institutionnels puisqu’ils ne sont pas destinés à être vendus aux investisseurs de détail.
  • Les produits de retraite individuels et professionnels ayant pour objectif de fournir à leur investisseur un revenu seulement lorsqu’il sera à la retraite.

La commission a prévu un réexamen portant sur l’extension éventuelle du champ d’application du règlement dans 4 ans.

Les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) ne seront pas soumis au règlement pendant cinq ans. Ils doivent déjà respecter les obligations en matière d’informations clés découlant d’autres règles de l’UE (directive 2009/65/CE). Dans le cadre du réexamen du règlement, la Commission évaluera s’il y a lieu de prolonger la période transitoire de cinq ans accordée aux OPCVM.

Le règlement impose, et c’est la grande nouveauté, à toutes les personnes qui fournissent des conseils relatifs à des produits d’investissement packagés fondés sur l’assurance, ou les vendent (gestionnaires de fonds, entreprises d’assurance, établissements de crédit, entreprises d’investissement), la rédaction d’un document d’information clair et compréhensible par tout investisseur, lui permettant de comparer les offres, et d’investir en connaissance des risques encourus.

Les personnes qui conseillent ou proposent de tels produits seront responsables de l’exactitude des informations fournies.

Elles doivent veiller à ce que les informations sur les produits soient exactes, loyales, claires et non trompeuses pour les investisseurs. C’est pourquoi des normes communes pour la rédaction du document d’informations sont établies pour aider à leur compréhension.

Compte tenu des difficultés éprouvées par de nombreux investisseurs pour comprendre la terminologie financière spécialisée, une attention particulière est accordée au vocabulaire et au style utilisés dans le document. Des règles sont aussi établies quant à la langue de rédaction du document d’informations.

Les établissements doivent veiller à éviter l’usage de jargon et de terminologie financières, qui ne peuvent être immédiatement compris par un investisseur non averti.

Les investisseurs doivent recevoir les informations nécessaires pour prendre une décision d’investissement éclairée, et pour pouvoir comparer différents produits, mais il existe un risque qu’ils ne les utilisent pas si elles ne sont pas présentées de façon brève et concise.

Le document d’informations doit donc contenir uniquement les informations clés, notamment en ce qui concerne la nature et les caractéristiques du produit, par exemple, le risque éventuel de perte de capital, son profil de coût et de risque, ainsi que des informations pertinentes sur ses performances, et certaines autres informations spécifiques nécessaires pour comprendre les caractéristiques de différents types de produits.

Des calculateurs de coûts sont déjà en cours d’élaboration au niveau national pour les produits d’investissement. Toutefois, pour être pleinement utiles aux consommateurs, ils doivent couvrir les coûts et les frais prélevés par les différents fournisseurs de produits, ainsi que les autres coûts ou frais prélevés par des intermédiaires ou d’autres parties de la chaîne d’investissement.

Le document d’informations clés sera rédigé sous une forme standardisée permettant aux investisseurs de détail de comparer les différents produits. Les informations à mentionner et la présentation de ces informations répondront à des normes techniques de réglementation, qui tiennent compte des recherches déjà menées et en cours sur le comportement des consommateurs, notamment des résultats des tests portant sur l’efficacité de différents modes de présentation des informations auprès des consommateurs. Il en ressort que la forme standardisée aide à la compréhension des informations et à la comparaison des produits complexes.

Le document d’informations clé devra, le cas échéant, comporter un avis signalant à l’investisseur de détail que le produit présente une difficulté particulière, en particulier s’il utilise plusieurs mécanismes pour calculer le rendement final de l’investissement, augmentant les risques de mauvaise interprétation de la part de l’investisseur, ou si le rendement de l’investissement tire parti des travers de comportement des investisseurs, par exemple un taux « alléchant » suivi d’un taux conditionnel variable bien plus élevé, ou une formule itérative.

Les documents d’informations clés constituent la base des décisions d’investissement prises par les investisseurs de détail. Il est donc important que les investisseurs disposent d’un droit de recours effectif en cas d’irrespect de ces dispositions.

Les investisseurs qui ont subi une perte pourront mettre en cause la responsabilité de la personne qui a conseillé ou proposé le produit en cause, pour infraction au règlement, si le document d’information est incohérent avec les documents précontractuels ou contractuels signés par l’investisseur, ou s’il est trompeur ou inexact.

Il est important de noter qu’un règlement européen a un effet direct devant le juge, et prime le droit national : le justiciable peut exiger l’application d’un règlement européen, quand bien même il se heurterait à une disposition nationale contraire, laquelle est destinée a été abrogée.

Les nouvelles obligations seront d’application directe devant les Juridictions nationales deux ans après l’entrée en vigueur du règlement qui vient d’être adopté. Cette entrée en vigueur aura lieu 20 jours après sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Maud GENESTE
Avocat

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